jeudi 9 juillet 2015

Sentier

Toujours fascinant de passer quelques heures ou quelques jours avec quelqu'un que l'on connaît depuis très longtemps. Cela permet de réaliser comment la route sur laquelle nous sommes engagés a bifurqué, sinué, nous a parfois enchevêtré dans ses ronces. Certains semblent plus doués pour suivre des tracés aux contours définis, balisés, d'autres pour les chemins de traverse.

Au fil des ans, j'ai changé, bien sûr, me suis transformée, ai parfois joué au caméléon. Pourtant, j'ai l'impression d'être d'une certaine façon revenue à l'essence de ce que j'étais à la fin de l'adolescence, avant que les obligations de toutes sortes - réelles ou imaginées - ne se mettent à enrégimenter ma vie. J'ai endossé plusieurs rôles, le plus souvent avec conviction, me suis parfois perdue dans mon texte, ai bredouillé, me suis reprise. Tu le sais, je regarde rarement vers l'arrière, hormis peut-être au début janvier quand je reviens une dernière fois sur l'année précédente dans cette indispensable lettre que je t'envoie.

Il y avait quelque chose de troublant hier à juxtaposer cet avant et ce maintenant sur la terrasse ensoleillée de l'Olimpico, alors que les voix d'hier et d'aujourd'hui dialoguaient, se combattaient par moments. Toi dans le coin est, elle dans le coin ouest. Ton regard sur moi, sa main sur mon cou. Tes bras qui m'avaient enserré longuement, notre accolade empêchant ce pâle mais splendide Slave d'avancer. Ses gestes presque toujours mesurés. Une impression de dichotomie, d'écartèlement, qui ne serait pas entièrement dissipée quelques heures plus tard alors que je m'assoirais au piano pour l'accompagner dans des sonates pour flûte de Mozart, Handel et Dvorak, que nous déchiffrions des mélodies de Debussy qui ne la rejoindrait pas. Un parfum de nostalgie flotterait toutefois quelques instants pendant l'interprétation de la « Sentimentale  » de la Suite pour flûte et piano jazz de Claude Bolling...

Aujourd'hui, je lui préfère sans hésiter le concerto pour violon Affairs of the Heart du compositeur canadien Marjan Mozetich. Laisser parler le cœur.

Aucun commentaire:

Publier un commentaire