Contente de te retrouver enfin ici, d'avoir pu te parler de vive voix aussi...
J'ai passé quelques heures en compagnie d'O. Un plaisir comme toujours de la retrouver, cette fois-ci plus sereine, malgré de nombreux chamboulements dans sa vie dans les dernières semaines. Nous avons bien sûr parlé d'écriture, de littérature, de musique, mais nous sommes aussi attardées au phénomène des réseaux sociaux et des validations des égos de chacun par procuration. Est-il encore possible de nos jours de souper tranquillement sans que l'un ou l'autre des convives ne prenne l'assiette, l'assistance, lui-même en photo? Quand la vie virtuelle a-t-elle supplanté la vie réelle pour nombre de gens? Quand a-t-on oublié le plaisir pur de la rencontre, de la discussion, du véritable dialogue?
Je lui expliquais notamment que je songeais à désinstaller l'application sur mon téléphone, parce que c'était trop facile d'y jeter un coup d’œil et ce, plus d'une fois par jour. J'ai volontairement désactivé la plupart des notifications, sauf les nouveaux messages provenant du cercle des proches et, bien sûr, celles liées à La Recrue du mois. Néanmoins, je sens comment la fréquentation de ce salon virtuel - difficile de faire référence à une salle de presse, compte tenu du niveau du contenu habituellement proposé - a fragmenté mon souffle, que ce soit dans l'écriture ou même la réflexion et ce, en un peu plus de six mois.
Peut-on encore réfléchir en quelques paragraphes, développer une idée, ne pas avoir à circonscrire chaque moment, chaque émotion, en quelques mots lapidaires? Je ne suis pas contre le jeu de mots bien asséné, la formule efficace, au contraire. Ainsi, j'aimais bien l'été dernier, lors de la résidence de cirque, que notre animateur Johann nous demande de résumer le spectacle vu la veille en un seul mot. Pas toujours facile d'extraire l'essence même d'une proposition, de se faire une tête en un seul mot. Un défi que j'ai pris de plus en plus de plaisir à relever au fil des jours, qui oriente encore aujourd'hui mon travail critique, pas seulement au cirque.
Sommes-nous condamnés à souffrir d'un contagieux déficit de l'attention? La technologie n'exacerbe-t-elle pas les symptômes du syndrome, qu'il soit diagnostiqué ou non? Impossible d'oublier ce concert alors qu'un collègue, que je n'avais pas vu depuis cinq ou six mois, m'ignorait totalement pour vérifier son fil de « nouvelles », avant la moindre note jouée ou pendant l'entracte. Pensait-il vraiment que le monde - son monde - avait été bouleversé d'irrévocable façon en une heure à peine?
Pendant près de quatre heures, je n'ai eu accès à aucune technologie et ai pu me concentrer sur le moment présent, sur la présence de l'amie. Ai-je ressenti à un quelconque moment une lassitude? Aucunement, Au contraire, quand nous nous sommes quittées, nous avons parlé de nous retrouver dans quelques jours pour un souper de groupe informel... histoire de prolonger la conversation autrement.
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