mardi 30 juin 2015

Agressivité

Est-ce la pluie qui tombe tous les jours sans s'annoncer, l'absence de chaleur réelle, la morosité ambiante? Aujourd'hui, une vive impression que tous ceux croisés avaient les nerfs à vif, qu'ils ne pouvaient attendre une seule seconde de plus - en ligne, dans leur voiture, devant le camion de déménagement, peu importe -, qu'ils avaient l'impression d'être prisonniers d'une réalité parallèle, de celle qui broie les individus. Ont-ils même réalisé qu'ils disposaient d'une seconde de plus, qu'ils pouvaient tenter de truquer le temps ?


Connaître un artiste

Connaître profondément, véritablement un artiste, c’est être soi-même un artiste.


lundi 29 juin 2015

Du sous-titre (encore)

L'utilité d'un sous-titre? Avant tout pour le visuel de notre bannière. Ensuite pour donner au lecteur qui vient d'arriver sur notre page, une idée plus précise de ce que nous faisons, et ce même s'il est évident, à la simple lecture de l'un de nos billets, que nous ne parlons pas de hockey. 

Je serai laconique ces prochains jours. Il me semble que je cherche partout et nulle part, les minutes et les heures. Certes les rencontres pullulent, les occasions professionnels aussi. Même chose pour la joie, bien que la fatigue me gagne, sans parler de ce noeud au milieu du dos qui m'empêche depuis quelques jours de jouir pleinement des joies du café matinal. Seule consolation :  je n'aurai pas à déménager (ou à déménager quelqu'un) ces prochains jours!  

Magie des livres

Et c'est là en effet un des grands et merveilleux caractères des beaux livres (et qui nous fera comprendre le rôle à la fois essentiel et limité que la lecture peut jouer dans notre vie spirituelle) que pour l'auteur ils pourraient s'appeler « Conclusions » et pour le lecteur « Incitations ». Nous sentons très bien que notre sagesse commence où celle de l'auteur finit, et nous voudrions qu'il nous donnât des réponses, quand tout ce qu'il peut faire est de nous donner des désirs. Et ces désirs, il ne peut les éveiller en nous qu'en nous faisant contempler la beauté suprême à laquelle le dernier effort de son art lui a permis d'atteindre. Mais par une loi singulière et d'ailleurs providentielle de l'optique des esprits (loi qui signifie peut-être que nous ne pouvons recevoir la vérité de personne, et que nous devons la créer nous-même), ce qui est le terme de leur sagesse ne nous apparaît que comme le commencement de la nôtre, de sorte que c'est au moment où il nous ont dit tout ce qu'ils pouvaient nous dire, qu'ils font naître en nous le sentiment qu'ils ne nous ont encore rien dit. D'ailleurs, si nous leur posons des questions auxquelles ils ne peuvent pas répondre, nous leur demandons aussi des réponses qui ne nous instruiraient pas.

Marcel Proust, préface du Trésor des rois (Sésame et les lys) de John Ruskin

dimanche 28 juin 2015

Docteur Faustus

Un extrait du livre que je lis en ce moment : 

La vie et l'expérience peuvent donner à des vocables isolés un accent qui les dépouille complètement de leur signification usuelle et les nimbe d'un effroi incompréhensible à qui n'a pas appris à les connaître dans leur plus terrible acception. 

Docteur Faustus (Thomas Mann), Ed. Livre de poche Biblio, p. 20

P.-S. La traduction de Louise Servicen est en soi l'oeuvre d'un écrivain véritable.   

Sous-titre

Peu importe ce que tu choisiras d'intégrer comme sous-titre à Accord parfait. Celui-ci se révélera pertinent aujourd'hui, demain, dans un mois peut-être, devra être revisité ultérieurement. C'est la beauté de ce work in progress, de cet ouvrage qui prend des contours irréguliers, qui s'adapte aux interstices, n'a pas peur de partir dans de multiples directions. Tu sais combien les carcans me pèsent.

La question plus intéressante ici serait: pourquoi considères-tu nécessaire de préciser les intentions de ce lieu, de cette collaboration?

samedi 27 juin 2015

De la lecture et du reste

Des lectures obligatoires au secondaire, je n'en ai terminées aucune. Il y a  certes quelques livres marquants, principalement des romans dont l'histoire me captivait au plus haut point, que je finissais par délaisser, probablement parce que je préférais ne pas en connaître la fin — une habitude que j'ai délaissée, fort heureusement! Veinard, cela ne m'empêchait pas de passer avec succès les examens de compréhension écrite. Parmi les lectures marquantes, je nommerai Des souris et des hommes de Steinbeck, et Zone de Marcel Dubé. 

J'aimais lire ces livres, médusé par leur contenu, mais surtout dépassé par le fait qu'une histoire puisse me prendre au corps, m'arracher à la réalité. Mais je revenais très vite à la musique, au piano surtout, conscient que l'instrument à marteaux raffermissait l'estime (alors faible) de l'adolescent que j'étais.     


Droits

En effet, comment ne pas se réjouir que, enfin, le mariage homosexuel soit légal dans les 50 états! Pourquoi avoir attendu si longtemps? Question plus importante sans doute: est-ce que cela changera le regard que trop de gens posent sur les couples hors normes (homosexuels, transgenres, etc.)?

La plupart des gens affirmeront haut et fort qu'ils ne sont pas homophobes ou racistes. Dans la plupart des cas, malheureusement, cela relève plutôt de la pensée magique que de la vérité. Trop sont encore déstabilisés par la différence, peu importe sa nature, sont incapables d'une véritable acceptation de l'Autre...

vendredi 26 juin 2015

Tout écrire (ou presque)

On s’est manqués hier. J’aurais pu me rendre à l’appartement où tu étais, sur le Plateau (à 15 minutes de chez moi à pied), mais j’avais rendez-vous avec mon amie Sandra, que je n’avais pas encore vue cette année. Comme je l’ai déjà écrit ici, l’été revendique au sommet l’ivresse, la fièvre et l’exaltation. Au rythme effréné auquel il est vécu par bon nombre de québécois, il m'est impossible de ne pas me réjouir chaque fois que j’arrive au café et que le WiFi ne fonctionne pas (ce qui est le cas une ou deux fois par semaine). Je peux alors m’occuper de tâches que je garde habituellement pour le soir, à la maison : lecture, écoute musicale, réflexions. Ces pauses en plein après-midi rassérènent davantage l’esprit justement parce qu’elles font volte-face à l’habitude. Ironie du sort, celles-ci relancent mon envie de travailler. L'absence de WiFi interrompt certes l’élan de la besogne, mais il en amène un autre immédiatement, celui-là plus salutaire pour le corps, hélas!, au détriment du client qui attend notre réponse par courriel.

Ce faisant, ma présence sur notre blogue a été un peu plus irrégulière ces derniers jours. Bien que j’étais avec toi – et nos lecteurs – spirituellement parlant, je me trouvais dans des eaux un peu plus incarnées, plus diffuses aussi. Parlant de notre blogue, m’est venue l’idée d’ajouter sous le titre existant une épigraphe, quelque chose comme : « Écriture à quatre mains sur la musique, la littérature, la vie. » ou encore « Elle et Lui, chaque jour, autour de la musique, la littérature et la vie. » J’aimerais que l’on présente encore mieux notre page, histoire d’inviter plus cordialement, plus aimablement nos prochains lecteurs — et ceux actuels. Recréer un salon où l’on se tutoie dès la première rencontre.

Sur une autre tonalité, mon roman n’avance pas aussi bien que je le voudrais. Je dois l’avouer, l'été, tu le sais, je suis plus sensible à l’amour. Disons que c’est la saison où l’absence d’amour m’atteint un peu plus fort. C’est la saison où il est inexcusable, voire inacceptable de ne pas se trouver parmi les êtres. L’abondance de possibilités d’amour, d'affections et de chaleur (au réel comme au figuré) est si manifeste qu’elle fait sourdre nos carences un peu plus fort. Je n’y échappe pas, et c’est là que je suis contraint à l'amélioration de mon sort, en allant à la rencontre de nouvelles personnes et de nouveaux lieux. Me voilà précipitamment, joyeusement, indolemment prêt à aborder ces personnes, à leur parler de littérature, de musique, de notre ville, de leur pays d’origine, de leurs enfants qui vieillissent trop vite, de leur instrument de musique qui ne sert plus. Je suis chanceux, car les gens m’accueillent immédiatement, probablement sentent-ils que je n'attend rien en retour, que je n’ai pas peur de donner (tout donner, selon le cas). À ces moments où le don de soi dépasse les rythmes de la terre (père et mère de ce monde en savent quelque chose), j'oublie un peu plus qui je suis, ce que je donne exactement, pourquoi je fais ceci ou cela. Je ne sais qu’une chose, c'est que mon appariement à autrui est aussi instinctif que la soif, la faim, aussi inaltérable que mon besoin de dormir. C'est une nécessité animale. Au même moment, dans la rue, au café ou en compagnie d’un être qui révèle son unicité par sa seule capacité d’observer le monde de ses propres yeux et non de ceux d’un autre, je sens le silence et la solitude me manquer un peu plus. C’est ainsi que l’été m’anime et me déchire tout à la fois, comme incapable d'y vivre caché. Sous ces auspices, l'été ne peut être la saison du bonheur, mais celle de l’émancipation de la solitude vers une existence somme toute plus élastique, où la liberté se fait moins romantique, un peu plus superficielle.


En dépit du WiFi inopérant, j’écris chaque jour – en mode hors connexion – un billet pour Accord parfait. Il m’arrive parfois, en le copiant-collant vers le blogue, d’enlever une phrase ou même un paragraphe. Cette fois-ci, j’ai envie de faire autrement. Pour me dérober à l’incognito, je publie ici l’intégralité dudit texte. Les auteurs écrivent trop, n'écrivent pas assez juste. Au reste, la justesse, c'est plus souvent l’affaire du lecteur que de l’auteur.

De l'égalité et du progrès

Un jour nouveau apparaît – une ère nouvelle vient de poindre : la légalisation du mariage homosexuel aux États-Unis. Médusé, je lançais à ma colocataire que ce jour est à marquer d’un fer rouge dans le calendrier. Crier victoire devant l’éternel, car ce qui se produit en ce moment est plus important encore que les premiers pas sur la lune. Tout ceci me comble de bonheur pour notre planète, et je suis ô combien reconnaissant. Bien qu’hétérosexuel – et justement parce que je suis hétéro –, ma joie est intense pour les homosexuels du monde entier. La décision adoptée par le pays d’Oncle Sam est en voie de décupler l’égalité dans le monde. S’il y a une journée qui mérite d’être célébrée jusqu’à satiété, c’est bien celle-ci.

Les dates historiques sont des oeuvres d’art en soi. Puisse-t-on les exposer dans un musée, les interpréter au concert, les réciter devant la foule. Il faut continuer d’oeuvrer à ce qui nous dépasse. Vive le progrès! Vive l’existence!

« La liberté et le progrès, voilà les buts de l’art » (L.V. Beethoven)









Lire depuis toujours

J'ai peine à imaginer que tu n'aies lu un livre complet qu'à 25 ans. Il y a bien dû y avoir un roman imposé ou l'autre qui a croisé ta route avant cela... à moins qu'alors, tu ne pratiques la lecture en pointillés.

J'ai appris à lire dans Mon premier Larousse en couleurs avant même de rentrer à l'école primaire. (Je regrette aujourd'hui de ne plus avoir ce livre en ma possession.) La légende raconte que ma mère n'en pouvant plus de me « traduire » tous les mots qui croisaient mon regard (j'inspectais semble-t-il avec une même curiosité enseignes routières et boîtes de céréales), elle ait pensé qu'un dictionnaire s'avérerait l'outil idéal pour que je la laisse un peu tranquille.

Je suis rapidement passée aux livres pour enfants, que j'empruntais avec enthousiasme lors de mes escales hebdomadaires à la bibliothèque, lieu que je continue de fréquenter aujourd'hui à la même fréquence ou presque. Contrairement à toi, je ne lisais pas beaucoup de bandes dessinées (hormis les Tintin, Astérix, Boule et Bill et Achille Talon), mais j'avalais avec délectation tous les ouvrages de fiction. À neuf ans, ayant fait le tour complet de la bibliothèque des enfants (de modeste dimension), mon père m'avait permis de le suivre du côté des adultes. C'est alors que je me suis plongée dans les Agatha Christie, Arsène Lupin (je suivrais avec intérêt la série plus tard) et Sherlock Holmes.

On m'a posé un soir la question « Vous lisez depuis longtemps? » La première réponse qui m'était venue à l'esprit avait été: « Je lis depuis l'âge de cinq ans et je n'ai jamais cessé depuis! »

jeudi 25 juin 2015

Tendresse

Plongée dans ma lecture, j'ai entendu l'enfant rire avant de réaliser ce qui se déroulait à quelques centimètres à peine de moi. Dans mon wagon de métro, le père agitait avec vigueur un tyrannosaure de plastique. Avec celui-ci, il attaquait la vache (!) que tenait la petite. À chaque répétition du geste, la fillette poussait un petit cri ravi, sous le regard visiblement complice d'un autre passager.

La scène déjà aurait été suffisamment charmante pour qu'on s'y attarde. Elle a pris pour moi une tout autre teinte quand j'ai vu qu'alors que la main droite était occupée à distraire son enfant, la gauche était délicatement posée sur la cuisse de la mère, profondément endormie sur le bord de la fenêtre. Impossible de ne pas ressentir une tendresse certaine pour cet homme n'ayant pas peur de démontrer par le geste sa volonté de protéger les deux femmes de sa vie.

Tempo de jazz et de jasette

De retour à la maison après une petite excursion sociale dans le quartier. Ce type d'excursion s’apparente à quelques égards à mes excursions en solitaire; à condition seulement que la personne qui m'accompagne partage ou reconnaisse mon besoin de solitude, mon inclination à la vie intérieure. 

Mon amie Marie-Claude et moi arpentions hier soir les rues du centre-ville, à la recherche d’un moment et d'un lieu pour bavarder longtemps. Nous avons trouvé, sur quelque banc public à la Place des Festivals, tout près du Dairy Queen, pendant que la musique afro-soul rythmait nos foulées... et nos conversations. 

N'est-il pas vrai que le chemin est moins long quand rien ne nous arrête!


mercredi 24 juin 2015

Lire et relire

Il y a quelques mois, j’écrivais dans mon moleskine que d’aimer lire simplifie grandement ma vie, me permettant notamment un accès plus direct et plus aisé aux choses qui m’entourent — Il est presque tout de lire, disait Alain. Bien que j’aie toujours aimé la lecture (je fus toujours, et ce dès ma première année à l’école primaire, le lecteur préféré de mes professeurs), je lui ai toujours préféré la musique, découverte à six ans, par le biais d’une cassette de musique classique que ma mère apporta du travail. Ainsi, j’ai fait mes premiers pas dans le monde de l’art par la musique. Le jeune lecteur que j’étais demeurait actif grâce à l’encyclopédie familiale, au Petit Larousse (un cadeau de ma mère), et surtout grâce aux bandes dessinées empruntées chaque semaine à la bibliothèque. Cela a retardé l’éclosion de l’amoureux de littérature en moi, c’est pourquoi j'ai attendu d'avoir 25 ans avant de lire le tout premier roman de ma vie :   L’étranger de Camus. Époustouflé, j'empruntais la semaine suivante Humain trop humain de Nietszche, Les Pensées de Pascal et Regards et jeux dans l’espace de Saint-Denys Garneau. La même semaine, ou peut-être la suivante, j’achetais dans une bouquinerie les oeuvres complètes de Nelligan. Par ce dernier, pour la première fois de ma vie, j'ai versé une larme en lisant.

Est-il nécessaire de dire qu’on ne cesse jamais d’apprendre à lire; comme on ne cesse jamais d’apprendre à écrire. Et parlant du souci de lire toute l’oeuvre d’un auteur, sujet initiateur de ce billet, je pense à notre amie Olivia, qui, lorsque je l’ai vue la dernière fois, l'année dernière, poursuivait sa lecture de toute l’oeuvre de Thomas Bernhardt.


Lire intégralement les auteurs que nous aimons ne suffit pas. Il faut aussi les relire.