mardi 19 mai 2015

Basculer

Nous avons assisté à de nombreux concerts ensemble, mais n'avons jamais écouté de musique ensemble dans la nuit. Je me souviens de ce rappel de Menahem Pressler en quatuor (un Andante de l'opus opus 60 de Brahms absolument déchirant, que je réécouterais en boucle pendant des jours après, incapable de laisser entièrement se dissiper le souvenir), mais aussi de quelques écoutes téléphoniques mémorables, l'un jouant un passage, l'autre commentant. 

Un moment unique restera pour moi cet instant où je t'avais interprété une réduction du mouvement lent du Concerto K. 488 de Mozart, intégrant quand cela était possible la partie d'orchestre à la ligne soliste. Nous avons vécu ce soir-là un moment de grâce absolue, qui ne pourra jamais être reproduit exactement, ce qui rend cet instant d'autant plus miraculeux.

Dans Charlotte, David Foenkinos avance:
« Il existe un point précis dans la trajectoire d'un artiste.Le moment où sa propre voix commence à se faire entendre.La densité se propage en elle, comme du sang dans l'eau. »
Je me suis demandé si je pouvais en effet mettre le doigt sur ce point de non-retour. Était-ce lors de la publication dans le journal de l'école de mon conte Du beurre d'arachides sur Saturne (tu peux sourire à la lecture de ce titre) en sixième année du primaire? Était-ce plutôt après ce concert-midi à l'école secondaire, alors que j'avais accompagné une chanteuse dans un répertoire mixte? Je me souviens combien, cet après-midi-là, je n'avais pas porté à terre, réalisant pour la première fois de façon aussi limpide le plaisir pur que pouvait procurer la musique. Je n'ai jamais tenté de nier depuis son emprise.

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